L’Institut Mines-Télécom a eu le plaisir d’accueillir le Professeur Jari Hämäläinen, de LUT University (université de technologie de Lappeenranta-Lahti, Finlande), au sein de 3 de ses écoles (IMT Atlantique, IMT Mines Albi et IMT Nord Europe). Expert en mathématiques industrielles et dynamique des fluides, et membre actif de l’alliance européenne EULiST, sa visite a mis en lumière de nouvelles opportunités de collaboration scientifique et académique. Nous en avons profité pour lui poser quelques questions sur son travail, ses impressions et sa vision de la coopération européenne.
Qu’est-ce qui a motivé votre visite dans les universités IMT, et quels enseignements majeurs en retirez-vous, notamment en matière de sujets de recherche et de complémentarités avec LUT ?
J’ai d’abord fait une brève visite à IMT Atlantique et IMT Nord Europe en juin 2025, dans le cadre d’autres déplacements en France. Puis, en octobre 2025, j’ai passé une semaine complète à IMT Nord Europe et IMT Mines Albi , au cours de laquelle j’ai donné des conférences sur l’optimisation via la dynamique des fluides par calcul (CFD-based optimization).

IMT Atlantique a un profil de recherche très proche de celui de LUT : les axes stratégiques de LUT (2021–2025 : air, eau et énergie propres et business durable) se rapprochent fortement des thématiques portées par le département « Systèmes énergétiques et environnement » (DSEE) d’IMT Atlantique. Même si je ne suis pas expert des domaines eau, air ou énergie, en tant que mathématicien industriel je vois un fort potentiel de collaboration, autour de la modélisation et de l’optimisation mathématique en particulier sur le traitement de l’eau et les énergies propres.
Pour IMT Nord Europe, nous partageons des compétences très solides en CFD. Mais, à mon sens, les sujets ne sont pas aussi complémentaires : je ne pense pas avoir beaucoup à leur apporter personnellement, car ils sont déjà très performants en CFD. J’ai davantage d’expérience dans le développement de logiciels CFD internes et dans l’intégration de la CFD avec l’optimisation mathématique. Toutefois, les logiciels CFD commerciaux progressent et intègrent désormais de nouvelles méthodes d’optimisation basées sur la CFD, si bien qu’il n’est plus forcément nécessaire de développer son propre logiciel en interne aujourd’hui.
En revanche, LUT est en train de redéfinir sa stratégie de recherche pour 2026–2030 autour des ressources planétaires, de la transition énergétique, de la révolution numérique, du business et de la société.


L’axe « ressources planétaires » semble cohérent avec les travaux menés à IMT Mines Albi, notamment en ingénierie de la biomasse, gestion des déchets, énergies renouvelables via le centre RAPSODEE. Par exemple, nous pouvons avoir différentes sources de biomasse en Finlande et en France, mais les objectifs de recherche sont similaires. Taija Hämäläinen, directrice de recherche à la LUT University, pour l’industrie bio-forestière du futur, s’est jointe à la visite à l’IMT Mines Albi. Il existe de nombreux sujets de recherche potentiels dans le domaine de la biomasse. Personnellement, j’ai trouvé des sujets de recherche communs avec l’ingénierie des poudres. Cendrine Gatumel (enseignante-chercheuse, IMT Mines d’Albi) dirige un groupe de recherche solide sur les études expérimentales des poudres, et j’ai été invité à collaborer dans le domaine de la modélisation mathématique.

Par ailleurs, il y a déjà des échanges entamés, par exemple, un projet de modélisation des écoulements de poudres entre LUT et le groupe de recherche d’IMT Mines Albi dirigé par Cendrine Gatumel. Ce type de collaboration pourrait déboucher sur une thèse en cotutelle entre nos deux établissements.
Enfin, nous avons amorcé des discussions entre le centre d’ingénierie industrielle d’IMT et les sciences de la durabilité et sociales de LUT, avec pour ambition un projet européen commun.
Quelles pistes concrètes de collaboration envisagez-vous entre LUT et IMT, en recherche ou échanges étudiants notamment ?
Nous avons déjà préparé une demande de financement avec Cendrine Gatumel (IMT Mines Albi) pour modéliser des écoulements de poudres. Si le projet aboutit, cela pourrait se traduire par la co-direction d’une thèse. La ou le doctorant pourrait obtenir un diplôme dans les deux universités (cotutelle).
De plus, j’ai poursuivi des discussions avec Luis Fabian Fuentes Cortes (IMT Atlantique). Nous avons eu plusieurs réunions en ligne avec son doctorant autour de l’optimisation multi-objectif et des modèles mathématiques rapides à résoudre. Je suis favorable à l’organisation de visites réciproques entre IMT et LUT, pas uniquement pour moi, mais pour encourager un réseau plus large de collaboration au sein des deux institutions.
Selon vous, quels sont les défis les plus pressants et les opportunités les plus prometteuses pour la recherche transdisciplinaire au sein d’EULiST ?
Je dirais que, dès que nous parlons d’accords de cotutelle, nous sommes confrontés à différents types d’obstacles administratifs et bureaucratiques entre les pays européens. C’est également un problème entre les universités membres d’EULiST. Nous devrions mettre de côté les contraintes administratives et nous concentrer davantage sur les acquis d’apprentissage. Je crois que nous partageons une vision commune de ce que signifie être docteur en ingénierie, par exemple. Nous devrions chercher des moyens positifs de mettre en place des doubles diplômes doctoraux, plutôt que de chercher des obstacles pour ne pas les faire.
Je dirais que, lorsqu’il y a une volonté, il y a aussi un moyen de surmonter tous les obstacles.



